Le Temps - 24.02.2017
Disruption & innovation ou innovation & disruption
Le succès passe notamment par l‘innovation, les plus grands patrons vous le diront, c’est un des principaux moyens pour développer un avantage compétitif qui réponde aux besoins du marché. Dans nos entreprises et organisations, créer un climat propice à l’innovation est une démarche plus compliquée qu’il n’y paraît : mettre 3 hamacs, une moquette jaune et un babyfoot dans votre cafétéria et l’appeler « le Lab » ne suffira pas…
L’innovation peut être un processus délibéré et un état d’esprit. Elle peut déboucher sur un nouveau produit, un service, un procédé, un savoir-faire, un dispositif organisationnel, une démarche relationnelle même ou un ensemble de ces différents éléments. Ce n’est pas un débat d’idées, ce sont des décisions, des réalisations concrètes et elle doit être collective ou alors c’est de l’invention. L’innovation ne devrait pas être la chasse gardée de la R&D mais une préoccupation largement partagée dans l’ensemble de l’organisation. Cependant, la capacité à innover, à produire du changement, dans l’univers professionnel hyper standardisé dans lequel nous vivons, n’est pas évident et souvent, innover, c’est désobéir… Une culture de l’innovation ne peut se construire que par l’exemplarité quotidienne d’une structure hiérarchique qui démontre que c’est possible, qui accepte le tâtonnement, le doute et les essais infructueux sans les sanctionner, qui défend que l’innovation soit un chemin plus qu’une destination. Créer un milieu propice à la sérendipité (faire des découvertes par accident), tout en se rappelant la maxime de Pasteur qui disait que le hasard ne favorise que les esprits préparés. Jean-Claude Biver, patron de la division montres de LVMH, dit aussi qu’il n’y a pas d’innovation sans maîtrise du passé. C’est une évidence, avant d’inventer le cubisme, Picasso démontre dans ses périodes bleues et roses qu’il maîtrise l’art de la peinture. Dans un autre registre, Clark Terry, le grand jazzman américain récemment décédé, confiait : « imite, assimile, et ensuite innove ». Maîtriser le passé, mais être capable de créer la disruption pour s’en libérer, c’est rester maître de son destin. Ou alors, c’est l’innovation de vos concurrents qui vous imposera la disruption dans votre propre organisation. Un exemple : la Smart n’a pas créé la disruption qu’on attendait d’elle, quand le projet est passé de Swatch à Mercedes, il est retourné dans le passé. Pour innover, il ne faut pas être prisonnier de ses expertises.
Vous l’avez compris, développer une culture de l’innovation ce n’est surtout pas de mettre une boîte à suggestions à la réception de votre organisation. Si les idées doivent s’enfermer dans une boîte car elles sont incapables de remonter naturellement par l’encadrement, c’est que votre entreprise a du souci à se faire…